Le Psautier de Paris

Entretiens de Christian Förstel, responsable des manuscrits grecs, BnF et Jannic Durand, département des Objets d'art, Musée du Louvre. Les trésors du patrimoine écrit / Les documents de la Bibliothèque nationale de France - des Archives nationales à la loupe. Partenariat entre l'Institut national du patrimoine et Connaissance des arts. L'Inp, la BnF et les Archives nationales organisent chaque année un cycle de conférences consacrés aux trésors du patrimoine écrit. Conservateurs, historiens de l'art, spécialistes des textes et restaurateurs partagent avec les étudiants, amateurs et curieux leur savoir et leur passion autour de manuscrits et de documents originaux, qui sont exceptionnellement sortis des réserves de la BnF et des magasins des Archives nationales.

Exécuté à Constantinople au Xe siècle, le psautier de Paris est un témoin majeur de la renaissance culturelle que connaît l’empire byzantin sous la dynastie macédonienne (IX-XIe siècles) et un des chefs-d’œuvre de l’art byzantin. Ses quatorze enluminures en pleine page constituent autant de tableaux où se conjuguent influence antique et symbolisme impérial. Les miniatures illustrent des scènes de la vie de David (traditionnellement considéré comme l’auteur d’une grande partie des psaumes), ainsi que l’histoire de Moïse, la prière d’Anne, le prophète Jonas, la prière d’Isaïe et celle d’Ézéchias. Dans ce volume de grand format, la qualité exceptionnelle des enluminures trouve un écho dans la présentation raffinée du texte des psaumes qui est entouré d’extraits des grands commentaires patristiques (Origène, Eusèbe, Athanase, Jean Chrysostome etc.).

Même si elle n’est documentée par aucune mention explicite, l’initiative d’une telle œuvre ne peut provenir que de la cour impériale. Les représentations de David au début du manuscrit, celle d'Ézéchias à la fin du volume sont en effet remplies de références à l'empereur et à la vie de cour du Xe siècle. La comparaison avec d'autres œuvres constantinopolitaines et l'analyse de l'écriture suggèrent une datation proche du milieu du Xe siècle et semblent accréditer l'hypothèse traditionnelle d'un lien entre le manuscrit et les empereurs Constantin VII Porphyrogénète et Romain II.

Ce manuscrit exceptionnel est demeuré à Constantinople jusqu'au XVIe siècle : quelque trois cents ans après sa création, il semble même avoir directement influencé des miniaturistes constantinopolitains sous les premiers Paléologues (seconde moitié du XIIIe siècle). Vers 1560, le manuscrit est acquis par Jean Hurault de Boistaillé, ambassadeur du roi de France auprès du Sultan, avant d'intégrer au XVIIe siècle la Bibliothèque royale de Paris avec l'ensemble de la collection de Hurault. Il vient alors enrichir ce qui deviendra bientôt le plus beau fonds de manuscrits grecs au monde.